UN PRINCIPE
INAMOVIBLE ET INTEMPOREL : FAIRE SUER LE BURNOUS !
par Jésus Crie
Extraits d’un article paru en 1948, signé Henry
Casseville, titré « Madagascar et
son avenir ».
Je le commente sur deux axes :
- L’aliénation, plus encore que par le travail, par la
consommation.
- Le cynisme colonialiste, et cela a-t-il vraiment changé.
« Le problème
de la main-d’œuvre, le plus grave de tous, n’a pas encore été résolu (...). Le
Malgache n’est pas travailleur, c’est un fait ; ce n’est point de sa faute
si la nature est généreuse et si ses besoins sont extrêmement modestes. La
civilisation occidentale ne l’a pas encore touché pour qu’il aspire à une vie
confortable. »
Sa vie était certainement confortable selon ses propres
critères, sinon il n’aurait pas commencé par résister aux envahisseurs venus
lui apporter leur « civilisation »
et des caleçons troués.
« Et
cependant le Christ enseigna que l’homme doit gagner son pain à la sueur de son
front ».
C’est pas le Christ qui a dit ça, mais la Bible. Mauvais
chrétien, le Riton !
« ...et
plus d’un million de Malgaches sont chrétiens ! »
Preuve que tes missionnaires ont mal fait le job. Dame,
quand on doit engrosser les grandes et sauter les petites, on peut pas tout
faire.
(Puis il dit que la main-d’œuvre manque)
« C’est chose
explicable, si l’on sait que chez les Bezanozano, tribu de la région de
Moramanga, l’homme travaille en moyenne quatre heures par jour et trois jours
par semaine. Les Bezanozano sont d’ailleurs nos adversaires les plus rebelles
(...). »
Tu m’étonnes ! Ils vivaient bien et tu voulais les
obliger à suer pour toi et tes profits en leur donnant de l’argent pour acheter
ta quincaille ! Hélas, toi et tes potes ont été les plus forts...
« Cela prouve
que la liberté du travail minimum est peut-être l’objectif le plus important
des primitifs. »
Ah, au moins un truc que tu as compris d’eux. Mais la
liberté c’est pour toi, pas pour les « indigènes »,
hein !
« Ainsi toutes
les possibilités énormes de Madagascar seraient réduites à néant si le problème
de la main d’œuvre n’était résolu. Il faut revenir en arrière, atténuer les
conséquences inévitables de la suppression de l’indigénat (voir wiki), inculquer à l’indigène la notion de travail
nécessaire et pour cela accroître ses besoins en lui donnait les moyens
d’utiliser un argent qu’il méprise car il ne peut l’employer. »
Nous y voilà ! Accroître des besoins alors qu’on
n’en a pas (en tout cas, les tiens), c’est ajouter à l’aliénation du travail
celle de la consommation. Visionnaire, ton truc : nous en sommes là, à
bosser et bosser (enfin, ceux qui ont du taf) pour pouvoir changer de télé,
d’ifaune, de 4x4 et partir en vacances au Club Merde de Nossi-Bé,
Madagascar !
(Et la conclusion, sublime)
« Madagascar
reste un atout de premier ordre. La métropole ne peut la laisser à l’état de
domaine en friche. Son prestige est en cause. Son intérêt aussi. »
L’est pas à la fin par hasard, ce mot ! Ce pays,
pour toi, n’était qu’un « intérêt »
à prendre et tu ne lui as donné que des miettes et, la suite l’a prouvé, la
misère matérielle et humaine !
Et, pour une foule de pays d’Afrique, cela a-t-il
vraiment changé ?
Déjà quand on commence à dire "Le Malgache" (le Corse, l'Arabe, l'Espagnol) on est très mal parti. Droit vers l'essentialisme à des fins péjoratives.
RépondreSupprimerBen oui, c'est aussi ça, la mondialisation: créer des besoins chez des gens pour satisfaire ceux des autres... Tout en ne permettant plus aux asservis de satisfaire leurs besoins premiers. Déplantons le manioc ou d'autres plantes vivrières pour les remplacer par du café ou d'autres choses.
La mondialisation sous le joug du capitalisme financier finit par faire de nous tous des colonisés.
En 1970, en Côte-d'Ivoire, pour inciter les Sénoufos du Nord à abandonner les productions vivrières pour la culture à destination de l'export, la SEDES, dans un rapport, recommandait de faire parcourir les campagnes par un camion présentant des radios transistors, pour créer un besoin, et donc de monnaie.
RépondreSupprimerCe qui est effarant, c'est que ces colons ne se demandaient pas quelles conséquences auraient leurs méthodes sur les gens. Vaches à traire, moutons à tondre, bêtes de somme, peuples soumis à leurs besoins: telle est leur logique.
SupprimerLes Benozano, ennemis jurés de M. Casseville, travaillaient donc selon lui 12h par semaine. Ce cher homme devait compter comme "travail" certaines activités et ne pas en inclure d'autres qui, pourtant, permettent de vivre!
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